Crack , Dépendance , Amour , Sevrage , Crises ,
Une Histoire de Vie

11 Décembre 2011 départ de France en voilier, direction Martinique Brésil ,
10 Avril 2012 entrée officielle en voilier à Belem,
25 Mai 2012 arrivée en bateau à Itacaré, état de Bahia, Brésil.
29 Aout 2013 signature du compromis d'achat de la fazenda .

Fin Novembre 2013.....Voilà 18 mois que je suis arrivé au Brésil, autant de temps que je croise
cette "fille" qui mendie , Isis, une jeune femme bizarre, qui fait l'aumone, ou se prostitue,
ou encore fait des massages sur la plage. Ça fait 18 mois que je la vois évoluer..
C'est sùr, elle prend du Crack, parfois elle est très "speed", horrible, agressive.
Elle parle de dieu, se donne des claques, baisse la tête comme un moine hindou.....
D'autres fois, elle semble mieux, bien habillée, elle dit faire une "thérapie", je la croise, de loin,
sur la plage, elle joue au volley.....enfin presque...elle est avec une équipe,
mais ne semble pas s'intéresser vraiment au ballon...
Elle esquisse des pas de danse....C'est beau... de la voir ainsi, danser...légère...
malgré une grossesse évidente...Elle oscille entre le Crack, et une vie normale, des moments
de stress, d'agressivité, et d'autres de tranquilité, où elle gagne sa vie avec des massages...
Un autre jour je la croise, de plus près...Elle veut de l'argent..Je lui dis que j'aimerais l'aider,
mais je ne sais pas comment ??? elle a besoin d'huile pour ses massages..
Ok je vais avec elle, en acheter à la première pharmacie..
Puis elle veut aller acheter autre chose, mais je ne la suis pas . Je lui donne deux "reais",
et elle embrasse mon tea shirt...Un geste de remerciement, mais tellement "exagéré".
Deux reais " 70 centimes d'euro"...rien ..ça me gène qu'elle soit aussi reconnaissante pour
si peu. Elle me fait de la peine, et en même temps je la trouve belle.
Elle semble assumer sa grossesse, cet enfant....

En fait ici, Itacaré, ou au Brésil en général, il y a beaucoup de mendicité.
Je ne donne jamais d'argent, ou si peu. Et puis le Brésil est un paradis, de la forêt fructifère...
On peut vivre sans rien, seulement de cueillette.

     
 
 

 

18 mois que je vis sur le bateau, ancré au milieu du fleuve.
Je viens de signer l'achat d'une fazenda, terre, forêt, cacau, une maison.
Je restaure la maison, et je me dis que pour ne pas rester seul, je pourrais tenter de partager
ce lieu avec Isis. J'ai travaillé sept ans avec des toxicomanes, dans la rue, ou en centre de soins,
héroine, canabis....J'ai un peu d'expérience. Peut-être que j'arriverais à la sortir de la rue
et du crack...
Alors je dis à mon ami Marc , que s'il la voit passer, il faut qu'il lui dise que j'ai une proposition
à lui faire. Elle pourrait venir vivre dans la fazenda, et essayer d'arrêter de fumer du "crack",
me donner un coup de main pour la maison, etc...
Marc le lui dit, et du tac au tac, elle répond :
"Oui, il serait temps , au septième mois de grossesse, que j'ai une présence masculine auprès
de moi"....Et elle ajoute: " da o recado pra ele"...c'est à dire "passe lui le message"....
J'en reviens pas de son "tac au tac". Très fin....qui semble dire je veux bien aider ,
avoir une présence masculine, mais arrêter le crack, ça, c'est une autre affaire.
Impossible de croiser Isis par hasard, ou d'attendre patiemment qu'elle passe sur la plage,
alors, je demande à Marc de lui dire encore, s'il la voit, que je l'attends à la Tapiocaria vers 18h
demain. Marc le lui dit, et elle lui répond : " Estarei", "j'y serais".

Le lendemain donc, je l'attends, me demandant si c'est bien raisonnable, ou vais-je.....?.
Vers 19h , ne l'ayant pas vue, je pars, et elle arrive, toute pomponnée, ongles soignés, jaunes.
Elle a besoin d'argent, 20 reais. Je lui dit que je vais l'aider, que je ne sais pas trop comment,
mais que je crois que ce serait bien pour elle de s'éloigner un peu d'Itacaré .
Je vais lui montrer la Fazenda, et elle verra si ça lui plait.
Elle propose de venir ce soir sur le bateau, et visiter demain la Fazenda .
Je n'ai pas trop envie de faire ainsi. Un peu trop précipité à mon goût.
Je lui dis que demain matin, j'ai plein de choses à faire, mais que je peux l'emmener demain
à midi.
Elle est d'accord. J'essaie de savoir un peu sa vie.
Elle vient de Sao Paulo, et a vécu à Porto Séguro, puis à Itacaré. Elle a 33 ans,
une fille de quatre ans gardée par sa mère. Elle n'a connu son père qu'à 15 ans.
Elle dort chez un ami, ou souvent sur la plage, ou ailleurs....On marche dans la rue,
elle s'extasie devant la boutique de parfum, puis devant de petites chaussures roses avec
une fleur ! Elle baisse souvent la tête, fait des signes de croix, me remercie toutes les dix minutes.
Elle est très touchante, avec ses trente trois ans, et ses airs de petite fille, ou de femme dure,
Ça dépend des moments.
Mais l'impression majeure est que c'est une petite fille.
Bref, je lui donne rendez-vous demain à Casa de Taipa, mon restaurant préféré,
ou je déjeune presque tous les jours. Je me dis ; ça lui fera pas de mal de faire un repas correct.
Le lendemain, midi pile, elle arrive, hésite à s'approcher du restau, reste en arrêt comme une
enfant timide....Elle s'avance, mais les "garçons" ne la laisse pas entrer.
Je vais aussitôt leur dire que je l'ai invitée.
Et je mesure déjà une part de sa vie. Visiblement, elle est mal venue dans ce restaurant,
sans doute a-t-elle suscité des problèmes......
Je l'emmène vers la "lancha", la barque , puis visite de la Fazenda....Elle est toute contente,
mais, j'ai du mal à savoir si elle feint, ou si c'est naturel....
Elle a des attitudes de cover girl, un peu comme ces femmes qui cherchent à accrocher
un homme qui a de l'argent.
Après avoir visité la fazenda, elle veut rester sur le bateau. Quand je lui propose de s'installer
dans la cabine avant, elle dit qu'elle préfère dormir dans le carré à coté de moi, le lit d'à coté.
Il semble qu'elle soit à la fois très dépendante affectivement, et .....Je ne sais pas.....
Finalement on se rapproche, on dors ensemble, on couche ensemble.....
Je ne suis pas très fier de moi, en même temps j'ai envie d'elle, quatre années seul ????
Elle joue l'amoureuse, la petite fille, la barbie qui s'extasie devant une robe de mariée.
Elle fait la cuisine, nettoie le bateau, chante deux heures durant devant le tracto-pelle tout neuf
qui vient d'arriver. Ce fut un moment mémorable. Elle s'est mise à chanter , assise sur le tracto,
à la manière d'une femme possédée par je ne sais quelle autre entitée....bizarre....
j'étais très gêné, embêté. Mon ouvrier était là, on travaillait dur pour que cette machine puisse
traverser un petit ruisseau. On coupait du bois, entassait des branches, des feuillages, et
Isis chantait à tu tête, en vérité, comme une folle...Il semblait que rien ne pouvait l'arrêter,
et surtout rien ne "devait" l'arrêter.
J'avais peur......peur qu'elle fasse une crise...un délire......mais non, rien de plus qu'un chant..
libre....
2 décembre, le soir, en arrivant au bateau avec la barque en alu, elle ne supporte pas d'avoir
à l'amarrer, parce qu'elle n'y arrive pas. Elle veut que je l'aide, mais je lui réponds qu'elle peut
y arriver seule.....C'est la crise de nerf......Je ne supporte pas ça, et la laisse seule dans la fazenda
pour passer la nuit. Le lendemain elle veut partir. Je la ramène à Itacaré.
Je me sens coupable...manque de patience. Avec le recul des mois, je me suis remis dans cette
situation, et je me suis aperçu qu'il était assez difficile d'amarrer ce coté de la barque.
Le lendemain à Itacaré, je fais le tour des gens qu'elle m'a présenté, ses amis,
pour lui faire savoir qu'elle peut revenir. Le lendemain elle se présente à "casa de taipa"....
Et voilà, retour à la fazenda. Elle semble être très bien ici, mais les allers retours à Itacaré
sont un peu une épreuve chaque jour, pour moi.
Elle y est dans un état d'excitation difficile à supporter..beaucoup de demande d'achats divers...
Chaque jour amène une petite crise , avec clash possible, aux limites.....
mais, bon,elle ne part plus, s'excuse abondemment......
Je reste très étonné , content, parfois désemparé....
Elle veut aller chercher ses affaires.....où.....en fait elle dormait "vivait", dans un squat installé
dans une immense maison jamais terminée, en face de la mer , à 50m de la plage.
Un peu dégueulasse, mais rien à voir avec les squats des caves parisiennes..
Le soleil, la plage, squat de rêve....On récupère ses affaires....des trésors de chiffons....
Le temps passe, pas de crise, je lui achète de l'"herbe", canabis, j'ai aussi payé ses petites dettes
(30 reais ), c'est pas grand chose, mais très désagréable.
Aller rendre visite aux dealers, dans un quartier malfamé....J'ai choisi de lui laisser de l'herbe
à disposition, car c'est le seul produit notoirement utilisé pour aider au sevrage de crack,
et puis c'est léger, et sans doute moins toxique que les médicaments psy.
Je me sens bien souvent dépassé par les difficultés...tiraillé aussi entre mon désir initial de la
sortir de la rue, et des sentiments amoureux naissants, la nécessité d'être à la fois un éducateur..
un peu un père...un amant...un thérapeute .....
J'entre en contact avec le " CAPS " ou centre d'attention psycho social de Itacaré.
C'est une structure type centre de jour .
Ils organisent des activités de peinture, sport, repas de midi gratuit. Il y a une psychologue et
une psychiatre. Je rencontre toute l'équipe, et j'évoque avec la psychologue ma situation
et celle d'Isis. Ils la connaissent un peu, mais sans plus . Elle a l'habitude de déjeuner là,
parfois de participer à des activités.
Isis est donc de retour. elle plante, repique des fleurs, arrose le jardin, fait le ménage, cuisine,
avec baucoup d'énergie, avec quelque chose d'obsessionnel.....de vital, comme peut-être un
enfant hyper actif.......décore la maison, fait du crochet , couds une petite serviette....
Elle a des besoins sexuels importants, on fait l'amour ,toujours à sa demande :
"vai me levar pra cama ??"....Puis je me lasse et elle le sent...
S'éloigne un peu....se dit jalouse .
Je suis tendu, fatigué....Contrarié par pleins de petits problèmes, le projet d'électricité qui
n'avance pas, l'achat d'une voiture reste impossible...le groupe électrogène en panne....
J'ai de plus en plus de mal à la supporter....car elle m'aide aux taches du quotidien,
mais impossible de parler de quoique ce soit, et il y a ses crises de nerfs qui sont là, comme une
présence permanente, comme du lait sur le feu.
Et surtout, je ne sais pas ce qu'il se passe. Qu'elle rit, pleure, soit triste, elle refuse toujours de
dire ce qui se passe pour elle, dans sa tête, à quoi pense t-elle ?.
Je la regarde, et elle a ce regard bizarre, pas vide, mais "étonné", ou fait des grimaces....
Je crois qu'elle ne voit pas " l'autre ".  Je dois faire ceci, ou celà...pour elle...pas vraiment pour
lui faire plaisir, mais parce qu' elle le veut...comme ça...sans raison.
Faut-il être sa "chose".....
Après deux jours de distance, ce soir, j'ai l'impression que j'ai du mal à reconnaitre que je l'aime..
...On fait l'amour.....
Ce matin, je reviens du bateau, elle a ouvert le pot de vernis, pour faire un collier....
Elle en a mis par terre....sur le couteau de cuisine. ...sur ses vêtements, sur les fenêtres.
Je lui rappelle assez durement qu'elle ne doit pas faire ainsi, et doit m'en parler avant de se
lancer dans du bricolage.....Elle se met en colère....moi aussi...." vai em bora "...
Elle refuse de parler , d'entendre des explications .
Elle prépare ses affaires pour retourner vivre à Itacaré. Je suis soulagé....
Je vais pouvoir me reposer....Mais sa grossesse arrive à terme....quoi faire ?
Impossible de la retenir, quand elle fait une crise de nerf, je n'ai pas de solution , à part me taire
pour éviter plus de violence, elle casse du verre, menace de mettre le feu au jerican d'essence......
j'imagine voir tout exploser.....Je m'éloigne, elle se calme....et s'en va.....
Le lendemain, je vais déjeuner à Casa de Taipa, je suis triste....
Un crash pour un peu de vernis par terre....C'est tellement dérisoire....
Alors, je m'inquiète d'elle...à l'hopital d'Itacaré, on me dit qu'elle est passée par là, et qu'elle a
été transférée à Ilheus la plus grande ville voisine....Je vais à Ilheus, finalise l'achat de ma
bagnole tant espérée, et trouve l'hopital....elle doit être à l'autre, ou il y a une maternité....
Oui......elle est là...contente de me voir.......me met "Davi" dans les bras, c'est ainsi qu'elle l'a
baptisé...il est très mignon...Frippé , un peu moche comme tous les bébés......
Je rencontre infirmière et médecins, les mets un peu au courant de la vie d'Isis .
En retour, ils me disent que le bébé va bien, pas de problème pour l'instant.
J'évoque avec eux la question du "crack", et des conséquences sur un nouveau né,
sevrage éventuel.........Je ne connais pas grand chose sur le "crack". Eux non plus .
Ils vont appeller un de leurs collègues plus spécialisé.
Je vais revenir après demain, puis après demain encore........Nous parlons un peu..
Isis n'a pas la parole facile...Enfin, si, pour tout ce qui est facile à dire,.....mais les émotions, ...
les sentiments....???????????????
Pour moi non plus, c'est pas si simple.......On continue à faire connaissance..
J'apprends quand même que Davi a la siphilis, et elle aussi.....Je suis assez contrarié.....trop bête.
..trop con....Il faut que je fasse un test moi aussi.....le service public n'a pas les kits "siphilis"..
Ce sera donc un laboratoire privé....résultat dans dix jours.
En attendant , je dis à Isis, "plus de contacts, bisous....etc ....nada...".
Elle comprend, mais je sens que c'est pas net.
Elle a des gestes très sympas, me met Davi dans les bras, m'invite gentiment à "cuidar" de lui
(faire attention, protéger). Je suis très touché par ces gestes, et en même temps méfiant,
car je crainds qu'elle ne fasse celà avec des arrières pensées.
Elle pourrait vouloir que je le "reconnaisse". je suis très ambivalent, car en même temps celà me
ferait plaisir de me déclarer comme son père. Mais je n'ai pas confiance en Isis, pas assez.
Un jour, à l'hopital, elle m'annonce tout naturellement, qu'elle a gouté les excréments de son fils.
....?????? Je suis abasourdi. Puis je réfléchi.....une pratique des sociétés primitives.....
Elle voulait savoir si il allait bien . Bon, ça me parait assez grave tout de même.
Isis reviens à la fazenda avec son bébé, "Davi". Je suis allé les chercher à la maternité.
Elle se montre très mère poule, inquiète, trop. Je lui répète souvent qu'un enfant, c'est déjà un
individu, et qu'il faut le respecter en tant que personne différente de soi.

                                                                     


,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,,deux mois passent sans que je trouve le temps d'écrire...............

.....après l'accouchement Isis s'est montrée très fusionnelle avec son fils.
Puis un jour , alors que le petit pleurait déjà assez souvent, je la questionne un peu plus, car ses
pleurs m'inquiètent . Elle me dit que ça fait trois jours qu'il n'est pas allé à la selle. ça dépasse
les bornes, et je lui dis qu'elle fait son cinéma surprotecteur, mais qu'elle laisse son fils souffrir
trois jours sans s'en préoccuper réellement.... Je lui signifie que si ça continue, je vais être obligé
de faire un signalement aux autorités. Le lendemain, elle s'en va.
Puis confie son fils à une de ses amies. Je fais une déposition au conseil tutélaire
(équivalent du service de protection de l'enfance)...car, je n'ai aucune autorité sur Isis, aucune
influence, et encore moins de pouvoir légal..Je sens en elle des désirs très ambivalents envers son
fils , je sens des attitudes surprotectrices dangereuses . Le sur-lendemain elle veut reprendre son
fils, et son amie le lui refuse...Crise s'en suit....Puis intervention de la police, et son bébé lui est
retiré et aussitot confié à sa mère. Je me sens coupable, ce n'était pas ce que je voulais.
Je retrouve Isis dans un état pitoyable, elle est retournée au crack bien sûr, elle revient à la
fazenda. Elle ne m'en veut pas. J'ai l'impression qu'elle est soulagée d'un poids.
Et puis, c'est d'elle dont je m'occupe maintenant..... Mais bon, elle veut retourner surfer......
semble souffrir, écoute et réécoute sans cesse un jouet musical de son bébé.
Surfer ??? Elle veut retourner fumer son crack en fait....
Enfin bref, elle est partie de nouveau et je ne sais plus quoi faire.....

Isis est partie avec 20 reais pour acheter de l'herbe. Je n'avais pas l'énergie de courir après des
dealers et elle voulait que je lui fasse confiance . C'était risqué, je le savais.
Mais comment montrer que ce n'est pas un problème de confiance, mais seulement la connaissance
du fait qu'elle n'est pas prête ......Enfin....Je l'ai laissée y aller seule...Une semaine qu'elle est partie
, elle ne reviens pas.....
Et je prends conscience qu'on a des points communs. Elle ne peut pas vivre comme tout le monde,
et moi, je joue les "profs" ou "éducs", et je ne peux pas vivre, moi non plus, comme tout le monde.
Pourquoi est-ce que je vis seul, si loin de mes origines ???
J'ai encore fait le con, toujours à donner des leçons, alors que je suis tout le temps au bord du vide,
sans désir, ni vraiment de plaisir.
Elle était bien plus vivante que moi.
J'ai cette même rage au fond de moi.
Et au lieu de partager, avec elle, je suis resté sur mon pied d'estale...

Isis, c'est une personne très étonnante, deux personnalités.
Une petite fille, qui, pour passer Noel demande seulement de regarder un dessin animé , qui chante
deux heures sur le tracto-pelle tout neuf . Elle est toujours bien, dit bonjour à tout le monde dans la
rue . C'est un peu son gagne pain, car elle sollicite de l'aide auprès de tout le monde, quelques petites
pièces de monnaie pour parvenir à acheter son caillou de crack . Mais sa manière de "mendier" a
un coté très sympa quand même, beaucoup de gentillesse, sourires, petits mots sympas aux mamies
qui l'aiment bien . Elle marche toujours sur le trottoir, et a peur de traverser les rues. Si des
personnes, des enfants, marchent dans la rue, elle va leur dire, avec beaucoup de gentillesse, que
c'est plus prudent de marcher sur le trottoir. Fait une prière à chaque repas pour remercier de la
nourriture, et du jour à venir qui est un cadeau.....Elle parlait à son fils tout le temps avant la
naissance, et m'invitait à en faire autant, avec beaucoup de "vérité".
Bien sûr il y a un peu d'extravagance dans tout son comportement, d'exagération, mais pas trop.
Sa folie est joyeuse, attendrissante, sans perversité.
L'autre versant c'est celui d'une jeune femme très dépendante affectivement.
Quand elle est là, dans la fazenda, toutes les dix minutes, elle m'appelle pour savoir ou je suis,
me suis partout. Par contre, elle pique des crises de nerfs toutes les semaines, et chaque fois je la
renvoie se calmer en allant parler à un arbre, et elle retourne à la rue.
Je suis assez dur je crois, trop . et ça ne permet pas de parler. Elle refuse de parler de toute façon.
C'est sur ce point que sa "folie" est visible.. Les choses se sont dégradées après la naissance
de "Davi". Elle jouait son role de mère assez bien, avec, la aussi, un peu d'exagération....
Mais quand elle m'a confié avoir goutté les excréments de son fils, là j'ai compris qu'il y avait un
problème grave. Je lui ai dit que ce n'était pas à faire ce genre de chose, et elle a semblé accepter.
Je me sentais souvent obligé de lui dire qu'un bébé c'était déjà une personne, qu'il fallait le
respecter comme un être à part entière .
Je répétais cela assez souvent sans avoir pleine conscience du pourquoi.
Je sentais que ça pouvait déraper, mais rien de vraiment dramatique.
Quand Davi dormait, elle souhaitait le voir éveillé, et quand il s'activait, elle essayait de l'endormir.
.... Ensuite les choses se sont agravées, mais plus par concours de circonstances, et aussi à cause
de sa grande agressivité quand elle pétait les plombs. Je reste avec cette impression que j'aurais
peut-être pu l'aider à apprivoiser sa folie, peut-être avec la mienne.
C'est plus difficile d'écrire sur le sujet de la sexualité, mais bon, nous avions des rapports très
satisfaisant, bien meilleurs que tout ce que j'ai pu vivre jusqu'à présent.

En fait, ça fait plus de quarante ans que je vis avec des idées de suicide, et c'est un peu comme
si j'étais au bord de la folie, sans vraiment m'y laisser aller, et peut-être trouver autre chose,
ce "moi" qui reste comme en prison.
C'est, je crois, ce que j'envie chez Isis, elle est vivante dans sa folie, et elle y est belle.
Un jour je l'ai vue participer à une partie de volley ball sur la plage. Elle était déjà enceinte de six
ou sept mois. Elle était dans une équipe, suivait des yeux le ballon, mais ne jouait pas vraiment.
Non, elle faisait des pas de danse dans le sable, au milieu des joueurs, et c'était beau....
Non pas que ce fut une danse sublime, mais elle paraissait tellement présente à ce qu'elle faisait....
C'est ce que j'ai trouvé beau. Cette sorte de présence à soi, une "liberté d'être", en dehors des
conventions. Eh oui, elle était censée jouer au volley . Eh bien non, elle dansait, et personne ne
semblait lui en faire le reproche. C'est en ce sens que j'ai le sentiment de n'avoir pas été à la
hauteur. Je suis resté entre deux, sur mon "quant à soi", dans ma petite prison à moi, bien au chaud,
et rassuré par mon bon sens.
Au lieu de la rejoindre, je suis resté loin. Elle est bien plus vivante que moi...
Oui, elle a sa prison aussi....Le crack....ça l'aide à supporter de ne pas pouvoir vivre comme tout le
monde. Là, après l'échec de sa tentative d'être mère pour la troisième fois, il lui fallait un secours,
une béquille.....Je me sens responsable en partie de cet échec, car j'ai voulu l'aider, et au lieu de ça,
je l'ai enfoncée.

 

En fait, pour revenir un peu sur le passé récent, et peut-être comprendre mieux , c'est après lui
avoir signifié que si elle ne s'occupait pas plus réllement de son fils, je ferais un signalement à un
service de protection, qu'elle est partie, par peur de le perdre, et il y a eu un problème lorsqu'elle a
donné son bébé en garde et voulu le reprendre.
D'après des témoins, elle a pris son petit, s'est baignée avec, mais d'une manière tellement excitée,
que les gens autour ont eu peur et ont appellé la police. Et c'est à ce moment qu'il a été confié à la
grand mère. Car Isis a déjà une fille de quatre ans confiée à sa mère.
Une semaine plus tard, elle est revenue à la fazenda . Je me sentais très coupable de toute cette
pagaille, et cependant, elle ne m'en voulait pas du tout, et paraissait même soulagée d'un poids.
Pour autant, elle parlait beaucoup de "Davi", faisait jouer sans cesse son jouet musical, j'avais
beaucoup de peine à la voir ainsi. Plus tard , j'ai parlé d'aller le voir, c'est à 400 km d'ici.
Puis elle m'a demandé de faire le voyage. rendez vous a été pris avec sa mère, j'ai acheté les
cadeaux qu'elle voulait . la veille, je lui prête un peu d'argent pour payer un acte de naissance de
sa fille, je viens la chercher, elle avait tout dépensé, et me demande de la laisser une après midi
en ville. Je n'ai pas accepté, car j'ai pris l'habitude de ne jamais la laisser seule, un peu à sa
demande d'ailleurs. Je lui ai dit , si tu sors de la voiture, tu ne reviens pas à la fazenda......
Elle savait que je n'allais pas accepter. C'est ainsi qu'elle cherche à me pousser hors de mes limites.
Le but étant semble t-il d' aller au clash toutes les semaines, ce qui semble correspondre à son
besoin de crack. Donc, elle est partie, n'est pas allée voir sa mère et ses enfants, et surtout à
revendu les cadeaux achetés pour sa fille. Le lendemain, elle me retrouve sur la plage ou j'amarre
la barque, j'étais tellement furieux qu'elle ai vendu les jouets des petits que je lui ai donné une gifle
devant tout le monde. Dans le travail avec les toxicos, j'avais beaucoup évolué vers plus de
tolérance, et redonner leur liberté de choix. Ce que je croyais avoir appris, ici, dans cette situation,
j'ai tout oublié, et je me retrouve avec ces vieux comportements inutiles......il faut les cadrer,
ils nous mentent, nous mènent en bateau.... En fait, j'oublie qu'elle est dépendante.... J'avais quand
même essayé de lui acheter du crack, et de la laisser fumer ici. Quand elle en a redemandé , j'ai
refusé...... En fait je crois qu'il faut que je lui propose de lui acheter du crack, et fumer ici.
Limiter les contacts avec la ville et ainsi la faire changer de vie doucement, sans chercher à traiter
la dépendance. ça devrait venir tout seul , par la suite. Je sens les choses ainsi. Il faudrait que je
l'accepte telle qu'elle est.........le problème, c'est qu'elle part dans tous les sens, et que je me sens
embarqué dans un voyage sans limites.....dejà je fume un joint de temps en temps avec elle,
elle m'a aussi proposé de fumer du crack avec elle...... C'est ainsi qu'elle n'a pas de limites, et
que je cherche à garder un peu de controle. Enfin, je crois que c'est plus sur la façon de dire les
choses , que je suis très maladroit.
C'était il y a déja quatre mois, en Janvier , Davi naissait.
Aujourd'hui, 15 Mai, Isis est repartie à la rue. Depuis tout ce temps, chaque fois qu'elle est retournée
au crack, je suis allez en ville , me montrant dans les lieux où elle pouvait être , pour lui donner
l'occasion de demander à revenir à la fazenda . Ça a marché ainsi chaque fois, elle me voyait,
venait me parler, et elle revenait à la fazenda, puis repartait en crise au bout de 7 à 10 jours.
Elle avait besoin d'avoir toujours quelque chose à faire, en plus de faire la cuisine ou s'occuper
de la maison, alors elle a voulu faire des bougies....j'ai acheté des moules, la parafine, les colorants
, et parfums...ça a duré quelques jours.....C'était aussi bien qu'elle abandonne cette activité car
son coté "excitée " m'inquiétait , et lorsque je la laissait seule, j'avais toujours peur d'un accident,
qu'elle mette le feu....
Alors je la guidais doucement vers le dessin.....Elle s'appropria cette activité avec une fébrilité
inattendue...imaginant une exposition à la fazenda.......Pourquoi pas...
Un soir, qu'Isis était revenue à la fazenda, je lui parlais de mes amies, et des abus sexuels que
certaines avaient subies. Plusieurs de mes amies m'ont ainsi confié des viols, incestes....
presque chaque fois, c'était la première fois qu'elles en parlait à quelqu'un.
Ce sont des situations que j'ai appris à connaitre malgré moi, et souvent avec douleur .
Je ne sais plus comment était venu cette discussion. Mais Isis était devenue peu à peu très irritée,
dérangée par ce que je lui racontais. Alors je lui demandais ce qu'il se passait; elle me répondit
qu'elle n'aimait pas parler de toutes ces choses désagréables. Ah bon.....Mais pourquoi ???
Est-ce que cela t'est arrivé à toi aussi ??
Elle me répondit: " Non........ seulement la curiosité d'un homme ".
La curiosité d'un homme ???
Quel était cet homme ?  "Le compagnon de ma mère.."
Et tu avais quel age ?  "6 ans ".
Qu'est ce que tu veux dire par "curiosité ".
"Eh bien, il m'a montré son sexe, et il m'a dit que c'était comme une sucette, et que si je le suçais,
il donnerait un jus délicieux."
Il est clair qu'Isis a été abusé sexuellement, mais elle ne le sait pas vraiment, ne veut pas le savoir.
Plutard elle niera avoir tenu ces propos.
Petit à petit Isis compris qu'elle pouvait revenir à la fazenda, malgrè ces crises.
Elle commença à revenir d'elle même .
Je l'ai récupérée un jour, une fois de plus,... et comme depuis quatre mois elle crisait chaque
semaines, je lui ai fait remarquer cela et proposé d'acheter du crack une fois par semaine.
ensuite on a parlé quantité, et elle a proposé 30 reais par semaine, soit "dix euros", ce qui ferait
40 euros par mois ???????? très peu, au regard de l'enjeu.. stabiliser une personne, et lui donner le
temps de se soigner...etc,, En fait, bien qu'aillant travaillé sept années auprès de toxicomanes,
je n'ai aucune expérience du sevrage de crack, et il semble d'ailleurs que personne ne sache
comment s'y prendre. Cet essaie de "crack une fois par semaine", n'a pas marché, Isis a fait ses
crises de nerfs quand même et est retournée fumer en ville.
Enfin..la vie continue....Lors d'un de ses retours, dès son arrivée, je lui ai proposé d'aller voir sa
fille, et son bébé, chez sa mère qui m'avait instamment invité à amener sa fille.
Dès notre arrivée, la mére m'a accaparée, et j'ai dû lui dire clairement que je n'était pas favorable
à ce que sa fille reste chez elle, mais que je n'interviendrais pas dans leurs décisions.
Isis s'est montrée très proche de sa petite , qui ne la lâchait pas d'une semelle, et qui, ensuite,
a fait pareil avec moi, avec des demandes de jouer, d'apprendre à lire l'heure..etc.
ça été très sympa, et tendu, car la mère d'Isis a eu beaucoup de mal à accepter que la petite
dorme avec Isis, puis, qu'on lui achète quelques cadeaux...etc, Au final, la mère d'Isis a pété les
plombs , accusant "mes cadeaux", quand la petite a vomi un soir. Je lui ai rétorqué qu'elle n'avait
cessé de stresser la petite "Maria" toute la journée, la forçant à manger, comme on gave les oies,
interdisant de jouer avec nos cadeaux......bref, la mère d'Isis nous a retournée la table par terre,
dans une crise de nerf très agressive.... Elle m'a demandé de partir. J'ai pris mes affaires et ai
laissée Isis seule avec sa mère , pour décider de ce qu'elle allait faire . Isis a préféré partir aussi .
De retour à Itacaré, j'étais épuisé, et un matin, je me suis levé d'assez mauvaise humeur, nous
avons fait des courses, et j'étais dans une humeur à refuser tous les caprices de la belle.
Ça n'a pas raté...à midi, c'était la crise de nerf , et le lendemain matin , elle me disait qu'elle
n'avait plus de sentiment pour moi.....Ce à quoi j'ai répondu , "eh bien, si c'est ce que tu veux,
tu peux t'en aller". Mais elle ne veut pas partir.....Pour moi c'était assez clair, "si t'es pas gentil,
plus de calin", plus crûment, " pas d'argent , pas d'amour". Tout ceci, au petit matin, avant que je
parte seul faire des achats. Je suis donc parti sur une rupture dejà décidée. Quand je suis revenu,
elle m'attendait sur le quai, vêtue en petite culotte, et drapée, très sexy.... et un trés joli bouquet
de fleurs à la main, me demandant si j'allais accepter un baiser...
J'étais toujours fatigué, pas de bonne humeur, ayant ruminé son annonce de départ; mais elle
change du tout au tout; je n'ai pas cette souplesse ; accepté le baiser, j'ai essayé de savoir ce
qu'elle voulait ?....rien... ensuite je l'ai ramenée à la rue. Je n'ai rien pu faire d'autre, tellement
j'étais en colère et fatigué . Mais maintenant, je me dis que j'ai été encore à coté de la plaque....
En fait, elle ne peut pas parler de sentiments , d'émotions... Mais elle était allée chercher ces
fleurs, et les tenait à la main pour me les donner, en me disant,
" si tu les prends pas, je n'ai plus qu'à me tuer....." .
Mais sur le moment, je n'ai pas entendu , ses mots me reviennent maintenant, avec plus de clarté
et de force, car les entendre en Portugais, pour moi, ça décale le temps de comprendre....
Voila, comment nous avons vécu ces moments.....Une fois de plus, elle a crisé, et j'ai l'impression
de ne rien entendre, ni comprendre au bon moment. Pas moyen de passer plus d'une semaine sans
"clash".
Isis a demandé à revenir, j'ai acheté son crack, puis ai dit que si elle tenait quinze jours tranquille,
elle aurait sa planche de surf. Au bout d'une semaine, elle a réclamé du crack, j'ai dit ok, mais bon,
tu n'auras pas la planche de surf, ce sera pour plutard........ Le soir elle a renoncé au crack, pour la
planche de surf, j'étais vraiment tres étonné, surpris, et le 15 ème jour j'ai reçu en cadeau une
planche de surf à réparer, de la part d'une amie d'ici. Donc comme promis, elle avait sa planche de
surf. Isis était toute contente. Le lendemain petite crise......puis, elle a demandé à retourner à la
rue......Ok......Après une semaine, cette fois, elle téléphone pour revenir..... Elle est ici.....
Petit à petit, elle demande à revenir, alors que jusqu'à présent, je la croisais dans la rue et elle me
suivait. Elle garde en mémoire les lieux ou elle peut me trouver, là, elle a même gardé mon Nº de
tel. Je crois que ce sont des progrès important....plus de confiance.... Tout va bien pour l'instant.
J'apprends aussi à me défaire des préjugés tenaces........ C'est vraiment très bizarre, car elle
revient toujours dans des états minables, et reprends, aussitot arrivée, d'autres gestes.....
faire la cuisine, laver le linge, nettoyer, planter , recoudre un drap........chanter......

On a continué ainsi jusqu'en  Aout 2014 . Isis passait une semaine ici, puis une semaine en ville.
Puis un jour, j'ai eu l'impression d'avoir perdu de l'argent...peut-être Isis ?
Un jour, elle revient seule, par elle même, à la fazenda, dans un sale état, pour parler, entre amis,
elle veut me parler. Je la laisse se reposer, et, comme j'ai un doute de vol, je vais compter mon
argent, puis retourne travailler. Nous déjeunons, parlons un peu, elle est un peu délirante.
En fin d'après midi, elle me demande de la ramener à Itacaré.
Je vais vérifier mon porte monnaie. Il manque 50 reais. Je le lui dis, car cette fois, j'en suis
absolument sûr.
Elle ne veut rien reconnaitre. Me crie qu'elle a travaillé, fait le ménage, etc... des arguments
habituels. Elle reste accrochée à l'idée que je l'ai embauchée...
Je lui répète que ça n'est pas vrai. La crise, cris, menaces....Elle s'arme d'un baton, en furie....
Ok, je vais te raccompagner, mais Isis tu dois entendre que "tu m'as volé 50 reais, et que tu ne
veux pas le reconnaitre.......
Et puis sur le fleuve, je me dis que je n'ai pas à lui rendre les départs aussi faciles , surtout après
m'avoir volé . Je décide de la déposer en face, sur l'autre rive du fleuve, un endroit de mangrove à
quatre km de la ville, donc dans la boue.
Elle refuse de descendre. Me menace avec l'ancre. Je vois rouge, et lui envoie un coup de rame .
Elle descend...
Je suis dans mon bon droit...enfin c'est ce que je pense....
Mais je me sens coupable...c'est une "toxico", c'est évident qu'elle peut me voler, et normal...
La semaine passe......J'ai croisé Isis, elle s'est cachée, et m'a fuit.
Ce soir 14 Aout, je l'ai croisée encore...Elle mendie, avec une fleur en papier dans les cheveux, et
elle a retrouvé ses gestes de petite fille timide, elle me fait peine, et je me sens encore plus
coupable. Elle n'a pas d'autre solution que de vivre ainsi...
Quand elle est "sous crack", Isis a des comportements masochistes, elle se donne des giffles en
marchant, fait des signes de croix,sourit à tous, ...ou se met en colère...
Bref, et je me demande pourquoi je rate tout...enfin, pourquoi toutes mes réponses sont décalées,
à coté, pas en relation avec ce que je voudrais...bref...discordantes...
Je voudrais pouvoir revenir à l'instant précédent pour pouvoir faire la bonne réponse..bien sûr,
ce n'est pas possible..

Par ailleurs je me suis embarqué dans de gros travaux.
C'est que depuis l'achat de cette fazenda, j'ai acquis un mini tracto pelle, je creuse, place des
tuyaux, m'embourbe souvent, pour faire trois bassins naturels qui vont servir de piscine,
de décoration. J'installe aussi un générateur à roue à aube dans la cascade....
Tout ça avec un ouvrier super sympa.....Deux ans de travaux durs, et Isis qui aide en s'occupant
de la maison, des repas, plante, fait des boutures......

Une fois, après une semaine sans crack, je lui ai proposé de faire une balade en bateau jusqu'à
Salvador.
Mon intention était de changer un peu de rythme, de lieu, et voir si celà pouvait avoir une
influence sur son rythme de "Crise ou Crack".
Mal de mer....Deux crises de nerf en arrivant, discussion impossible.........elle,........retour en bus....
moi, seul en voilier.
En fait, sortie du bateau elle a vadrouillé en ville, et comme la crise avait été assez violente,
menaces, etc...j'avais prévenu les gardiens de la marina qu'ils ne devaient pas la laisser revenir
sur le bateau en mon absence.
Elle est revenue au bateau quand je n'y étais pas, et a été rejetée par les gardiens.
Alors elle a vite rencontré un gars qui lui a dit ou trouver du crack ........pas compliqué.
Elle est revenue 15 jours plutard.
Une fois, nous avons fait une balade en mer, avec Pascal, et Jean.......
Elle avait très peur de se retrouver avec des gens qu'elle connait, mais qui sont plutot de mes
amis. Ce fut surtout un grand mal de mer.....
Je faisais des efforts pour trouver des portes de sorties à ces séries de crises....
Puis, j'ai enfin compris que j'avais des efforts à faire pour ne pas la suivre dans sa violence.
Car jusqu'à présent, j'ai presque toujours réagit en miroir à ses crises.
Alors, je parviens à la laisser s'énerver seule, et c'est elle qui revient s'excuser.
Ainsi, elle parvient à rester trois semaines sans crack. C'était la première fois que son séjour
durait.....
Pour la première fois aussi, qu'elle réussi à partir en disant qu'elle a besoin de fumer, et celà ,
sans crise.

Nous sommes le 20 Mars 2015, déjà plus d'un an qu'Isis reviens régulièrement à la fazenda et je
n'ai rien écrit.
Petit à petit, elle a trouvé seule le chemin. Le temps est passé ainsi, une semaine, parfois 10 jours
ici dans la fazenda, puis crise, retour à Itacaré, crack , rue, et retour fazenda .
Maintenant, elle économise l'argent sur ses dépenses de "crack", pour revenir en payant sa "lanche"
, barque .
Elle revient déjà un peu sevrée... Ce sont des progrès énormes.
Je réalise, en écrivant, qu'Isis fait de très grands efforts pour rester ici dans la fazenda.
Elle a même accepté de signer une reconnaissance de dette. J'ai fait une sorte de test.
C'était pour essayer d'évaluer son désir de s'en sortir. Bien sûr, je ne m'en servirais pas.
Mais ce fut pour moi, une preuve de sa bonne volonté. Car j'en doutais.
Elle est donc partie vendredi dernier, en disant qu'elle était trop mal.
Lundi, elle est revenue, et ce fut comme "une grande déchirure" dans ma tête, car j'ai été obligé de
lui dire qu'elle ne pouvait pas rester,
car je veux être tranquille pour recevoir ma fille, qui vient passer une semaine avec sa petite Luna.
Elle était triste, et m'a dit qu'elle aurait aimé que je lui présente ma fille.
J'étais très triste ausi, et me sentais coupable.
Mais je ne me sentais pas la force d'envisager d'assumer ses crises de nerfs avec ma fille au milieu.
Le Mardi, je suis allé la voir en ville pour lui donner un peu d'argent, et surtout lui dire
qu'elle pourrait revenir à partir du 4 avril (2015), et que je l'emmènerais faire une cérémonie
d'Ayahuasca.
Mon intention était qu'elle garde confiance, et que je ne l'abandonnais pas.
Bien au contraire, car chaque fois qu'elle part, je ressens encore plus que je l'aime.
Et je voudrais pas qu'elle fasse une bêtise pendant cette période.
Le lendemain j'ai rencontré Pedro et Dani, qui ont été très intéressés par mon histoire avec Isis.
J'ai connu Pedro et Dani lors de cérémonies d'Ayahuasca à Borboletta Azul .
Ayahuasca ??? Pourquoi ??? C'est une des décoctions utilisée par des indiens d'Amazonie, dans un
cadre rituelique, et il y a un médecin français qui a ouvert un centre de soins en Amazonie
péruvienne pour traiter les dépendances à la cocaine et au crack .
J'avais été invité par un professeur de yoga, il y a vingt ans, à suivre une initiation avec
l'Ayahuasca, ou avec l'Iboga.Mais j'avais eu peur de ces démarches.
Arrivé au Brésil, j'ai trouvé un centre psychothérapeutique qui propose un travail avec des
cérémonies d'Ayahuasca.
J'y ai suivi une cession de 10 jours . Ce fut très intéressant, et j'ai donc continué à participer à des
cérémonies Ayahuasca avec un autre groupe . J'ai ainsi acquis une petite expérience au cours
d'une quarantaine de cérémonies .
C'est ainsi que j'avais fait la connaissance de Pedro et Dani.
Ils m'ont proposé de rencontrer Antonio, qui était accro au crack, et a arrêté grâce à une cure
d'Ayahuasca.
J'ai rencontré Antonio le jour même et avons convenu de se voir avec Isis dès le 5 Avril, et préparer
une série de 9 cérémonies pour elle, que l'on fera dans la fazenda.
Déjà, ils ont parlé de planter les arbustes pour plutard.
J'ai donné 200 reais à Antonio pour les premiers frais.

Début Avril,j'ai des nouvelles d'Antonio, il viendra le 13 pour voir Isis.
En fait ils arriveront bien le 13,lui et sa compagne Maïra, et à peine arrivés dans la fazenda,
il pose deux bouteilles d'Ayahuasca sur la table,et la première cérémonie commence
sans que Isis ait eu le temps de se poser des questions.

C'était très bien ainsi, car j'avais peur qu'au dernier moment elle hésite, recule.
Six mois que je lui parle d'Ayahuasca.........et aujourd'hui, je ne sais plus comment faire pour stopper ce cycle de reproduction de situation de crises, L'Ayahuasca est la seule autre porte de sortie à expérimenter. Je lui en ai beaucoup parlé, et aussi j'ai suivi ce chemin avant elle pour ne pas l'embarquer dans une galère, ou prendre des risques inconsidérés. C'est pour ces raisons que j'ai voulu faire ces cérémonies à la fazenda, chez moi donc.
Elle but un demi verre, et nous tous, aussi.
Elle vomi, fut bien secouée, et jura, que jamais elle n'en boirait à nouveau.
La deuxième cérémonie dans la fazenda Jasmim, eu lieu sans Isis.
J'insistai beaucoup, et lui rappellais que Ayahuasca était la seule possibilité connue pour aider à sortir du "crack".
Elle participa à la troisième en buvant deux cuillères......


Isis demande à participer aux cérémonies, mais elle se limite à deux cuillères, ce qui la fait dormir.
Elle parle peu de ce qui se passe en elle, mais elle dit aussi "Ah, il faut que je pense un peu à mon
comportement".
Et ça, c'est très étonnant, car c'est la première fois en un an et demi qu'elle se remet en cause.
Enfin du nouveau, elle prends conscience qu'elle n'aime pas tout de son comportement..qu'elle veut
changer ......
Antonio et Maira sont partis. C'était bien qu'ils soient là..ça me faisait moins de poids sur les épaules.
Isis aime bien Maïra, elle parlait plus volontier avec elle.
On continue des petites cérémonies entre nous, moi et Isis, une fois par semaine, deux cuillères
chacun.
Cela nous apporte un moment de tranquilité d'esprit, de sérénité.
Isis va parvenir ainsi à ne pas fumer pendant un mois et demi.
Puis elle demande un peu de maconia...une bière...et elle veut retourner à Itacaré fumer du crack.
Elle dit : "préciso crack "   j'ai besoin....
Ok, la porte est d'autant plus ouverte, qu'il n'y en a pas.
Je vais en ville avec la barque, tandis qu'Isis attend sur le quai une bonne âme qui voudras bien
l'emmener.
Car quand elle veut partir, je ne l'en empêche pas, mais je ne l'aide pas non plus..
Lorsque je reviens, elle m'attend sur le quai, elle a décidé de rester...
C'est une super bonne nouvelle, et je reste très ètonné, elle a gagné des forces, une capacité nouvelle
à choisir, je ne sais pas ce qu'il se passe en elle, car elle n'exprime rien de ses pensées...
est-ce qu'elle en a ? est-ce qu'elle pense ? je ne sais pas, elle refuse en tout cas de communiquer ses
pensées. D'ou, plutot des crises de nerf.
Puis arriva des évènements imprévus qui nous causèrent beaucoup de difficultés.
Nous fumes assaillis à deux reprises par des bandits armés, le 22 avril et le 29 mai 2015.
Isis fut abusée, moi battu longtemps, elle tenta de prendre ma défense, au risque de sa vie.
Ce fut très violent, ils étaient quatre, masqués, armés, en furie......
Nous avons fuit la fazenda quelques jours.
Isis ne voulait plus y revenir tant qu'il n'y aurait pas des portes avec serrrures.
Elle avait raison . J'installais des portes , me procurais un chien , installait des projecteurs autour
de la maison.
Petit à petit nous sommes revenus au cours habituel de notre quotidien, travaux dans la fazenda,
dessin, et nos petites cérémonies Ayahuasca qui de loin en loin amenèrent Isis à rester trois mois
sans fumer , et sans crise de nerf.

Isis voulait bouger, aller à Salvador em bateau, voir des spectacles …..
Alors on a tenté de nouveau un voyage à Salvador. Ce fut une bonne navigation. Isis pris ses quarts
de surveillance, pendant que je dormais un peu. Puis Salvador, où elle voulu voir autant de chose
que possible, le musée de la marine, le phare, et une soirée au cirque.
Isis au cirque....ce fut un grand moment de joie et de rire pour elle...
un grand moment de joie pour moi de la voir ainsi battre des mains et rire et sauter sur son banc......
Ensuite on a visité aussi le parc zoologique..Elle voulait tout voir et tout faire comme une enfant.
Je rechignais à payer pour une photo avec Mickey.....alors elle en a pleuré....alors on a fait la photo.

                
          


J'étais toujours tiraillé entre l'envie de lui faire plaisir, de dire oui à tout..et mon besoin de limiter
un peu tous ses désirs....Ne faut-il pas, pour sortir de la drogue, de l'urgence, du tout et tout de suite,
qu'elle apprenne la frustration, la gestion des désirs, du manque.....??
En dehors des taches quotidiennes, moi à creuser piscines, ou placer des tuyaux d'eau, etc..
Isis à la cuisine, ou au ménage, Isis avait le temps de ses activités de "reconstruction".
Comme elle avait été formatée dans une école évangélique, pour contre carré cet enseignement
étroit, j'avais offert à Isis "une histoire brève du monde". Un livre d'histoire plus scientifique .
Elle avait aussi à disposition papier à dessin, crayon, feutres, peintures, et dessinait abondemment....
C'était son moyen d'expression privilégié. Une fois par semaine on allait sur la plage, elle surfait,
je nageais un peu et passais beaucoup de temps à la regarder. Elle avait besoin de ce regard , tout en
surfant elle m'envoyait des signes de la main.....pour s'assurer que je la regardais....
Oui, Isis, je suis là, je te "vois".....Il était important que je puisse décrire comment elle avait surfé
cette vague, et quelle belle chute.....
Un jour, un matin de bonne heure, peu de temps après que j'ai engagé mon troisième ouvrier/gardien
(caseiro, Nildo), elle se mit à courir après lui, en furie, en gueulant des mots désagréables que je ne
comprenais pas . J'essayais en vain de faire comprendre à Nildo de s'en aller faire autre chose...
mais rien à faire, il ne comprenais pas . Pour que cela ne dégénère pas, j'ai ceinturé Isis en pleine
crise de nerf, et je nous ai envoyé dans la piscine . Ça ne l'a pas vraiment calmé , elle sorti de l'eau
aussi furieuse, mais contre moi cette fois . Bon j'avais évité la perte de mon ouvrier .
Je n'ai jamais su le pourquoi de cette crise , C'était une période difficile pour nous.
Nous avions besoin d'une présence permanente pour nous aider à rester dans la fazenda .
Et j'avais beaucoup de mal à trouver un caseiro correct .
Le premier, Antonio , nous avait laissé tombé au bout de dix jours sans rien dire...Le deuxième avait
commencé à me voler le troisième jour...
Isis était extrèmement sensible, et il se pouvait qu'elle ait eu des impressions désagréables au sujet
du caseiro . Mais elle ne parvenait pas à en parler. Peut-être par refus de partager des bizarreries
du " Brésil ", de la mentalité très spéciale des gens d'ici .
Peut-être y avait-il de la peur ........


 
 

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